Thierry Bonnot

Résumé

À partir d’une réflexion sur les attachements réciproques entre sujets et objets, inspirée notamment par la sociologie des réseaux et le pragmatisme, cet article propose de combiner cette approche à une analyse transhistorique prenant en compte les caractéristiques physiques et dimensionnelles des objets. Les enquêtes ethnographiques sur la construction des patrimoines permettent d’analyser au plus près les attaches entre individus et objets hérités, montrant que la conservation patrimoniale s’apparente parfois à une forme d’encombrement. Celui-ci est d’autant plus prégnant qu’il concerne les restes de l’industrie, monumentaux ou massivement produits. Étudier les objets dans leur parcours, de la production au passage à l’état de déchet permet de tenir au plus près les variations des rapports entre l’objet et les individus qui le fabriquent, l’utilisent, le manipulent, s’en débarrassent ou le conservent. Au croisement de l’individuel et du collectif, l’attention à la construction patrimoniale nous apprend comment les sociétés s’attachent plus ou moins fortement à certains objets et assument la charge des vestiges encombrants, matériellement et symboliquement.

1typologie des savoirsdisciplinessciences humaines et socialesarchéologieDans un article très stimulant, l’archéologue Ian Hodder a retracé le processus de longue durée qui a rendu les humains et les choses interdépendants. L’humanité n’a pas toujours été submergée par les objets manufacturés. Le nomadisme est incompatible avec un matériel mobilier trop abondant et l’accroissement des biens matériels est intervenu avec l’agriculture et la sédentarisation, sans que la relation de cause à effet soit évidente : est-ce la sédentarisation qui a fait s’accroître la masse des objets mobiliers ou serait-ce la présence de plus en plus abondante de ces objets qui a obligé l’homme à la sédentarisation ? Plus l’homme fabrique et possède d’outils et d’accessoires, moins il lui est possible de les transporter, plus il doit trouver des solutions pour les entreposer. Plus l’homme accumule ce matériel, plus il est empêtré (entangled) dans les choses, explique Hodder 1. Par exemple, la culture céréalière a nécessité l’invention de techniques agricoles, donc d’outils, ainsi que d’éléments mobiliers nécessaires au stockage et à la conservation : les céréales ont en quelque sorte piégé (entraped) les humains, les contraignant à un travail plus dur et à l’acquisition d’équipement toujours plus important et envahissant. Les nouveaux modes de vie génèrent de nouvelles nécessités matérielles, les unes entraînant les autres. La relation d’interdépendance des hommes et des choses peut donc devenir un piège, social ou environnemental. Le modèle de croissance exponentielle enclenché il y a 10 000 ans au Moyen Orient est toujours en vigueur. Il inclut désormais, dans le cadre d’un enchevêtrement toujours grandissant, des changements environnementaux délétères et, selon Ian Hodder, le processus semble irréversible, car un système interdépendant ne peut être facilement déconstruit sans porter atteinte à son existence même.

2pratiques savantespratique corporelleperception acteurs de savoiracteur non humainobjet artificiel typologie des savoirsdisciplinessciences humaines et socialesanthropologieL’enchevêtrement tel qu’Hodder le définit est la combinaison de différents types de dépendances entre choses et humains produits relationnellement, que l’archéologie essaie de penser sur le long terme. L’anthropologie, dont le travail de terrain consiste à dialoguer avec des personnes afin de comprendre leur activité sociale et leur façon d’appréhender le monde, peut tirer profit de cette double caractérisation du rapport entre objets et êtres humains, combinant embarras et attraction. Parmi cette multitude d’objets dans laquelle nous sommes empêtrés, certains acquièrent un statut particulier, voire exceptionnel, parce qu’à un moment donné une ou plusieurs personnes leur ont accordé un intérêt singulier. Celui-ci peut-être affectif, nostalgique, intellectuel, voire vénal. Ce lien entre individus et objets, nourrissant, pour ce qui est de mon terrain, la valorisation d’un passé local et familial, ouvre une voie pour observer et saisir la construction d’un patrimoine au ras du sol, en partant du plus près de la relation entre objets et personnes, c’est-à-dire en considérant les pratiques et pas seulement les discours qualifiant une charge mémorielle des objets qui serait tenue pour acquise une fois pour toutes. La notion d’attachement semble féconde pour penser ce lien, cet enchevêtrement et ces rencontres. Elle permet d’analyser la multiplicité des liaisons entre les individus, les sociétés et les choses et de déterminer les modalités selon lesquelles les uns tiennent aux autres, donc s’y attachent, sans se limiter à la stricte équivalence entre attachement et affection. Cet article s’efforcera, après avoir exposé brièvement plusieurs perspectives théoriques sur les attachements et questionné la nature concrète de ces relations, de les rapporter au problème des dimensions matérielles des objets et des choses en tant qu’elles jouent un rôle crucial dans les liens avec les personnes et les collectifs.

Liens d’attachements et charge mémorielle

3typologie des savoirsdisciplinessciences humaines et socialessociologiethéorie de l’acteur-réseau typologie des savoirsdisciplinessciences humaines et socialessociologiesociologie pragmatique typologie des savoirsdisciplinessciences humaines et socialessociologiesociologie des sciencesLa sociologie s’est particulièrement intéressée à la notion d’attachement en l’enrichissant d’un point de vue pragmatique qui insiste sur la coproduction des liens en situation. Dès 1992, dans son analyse des réseaux technico-économiques, Michel Callon faisait de l’attachement l’un des pôles des stratégies des acteurs d’un réseau. Ces stratégies, ressorts du dynamisme des réseaux, forment une « dialectique de l’attachement et du détachement », compromis entre les deux extrêmes, entre « la capacité de fabriquer des irréversibilités pour les autres tout en se ménageant la faculté d’échapper aux irréversibilités que les autres fabriquent »2. Cette idée a été transposée à d’autres terrains, comme celui du goût et de sa construction, étudié dans plusieurs textes par Antoine Hennion 3, souhaitant se démarquer d’un déterminisme social trop univoque. Qu’il s’agisse des amateurs de vin ou de musique, penser les attachements permet de mieux comprendre les interactions, les effets produits par les personnes sur les choses mais aussi leur réciprocité car, selon cette perspective, les choses coproduisent ce qui se passe. Antoine Hennion se réfère explicitement à Michel Callon ainsi qu’à Bruno Latour et s’inscrit dans le même projet de sociologie de l’acteur-réseau et de la médiation. Pour Latour, l’attachement est une voie moyenne pour s’éviter de diviser l’action sociale entre acteur actif et objet passif… ou l’inverse4. Rendre compte de la réalité en distinguant soit un maître-acteur dictant impérieusement sa loi aux choses, soit une maîtresse-chose qui détermine implacablement l’action des sujets, ne permet pas de définir les attachements dans leur réciprocité, ni d’en évaluer la qualité. Dans une perspective symétrique, la notion d’attachement est un outil théorique destiné à se débarrasser de ce schéma considéré comme trop rigide et au final contre-productif pour les sciences sociales. Elle oblige à se concentrer sur l’action en train de se faire, sans privilégier un acteur ou un objet passif mais en tenant attachés les deux éléments et en tentant de qualifier ces attachements.

4espaces savantslieumusée espaces savantslieusanctuaireLes cas étudiés par des enquêtes de terrain montrent que les objets nous attachent autant que nous y sommes attachés. Ils nous attachent au sens où ils nous entravent, nous pèsent parfois et vont jusqu’à nous encombrer. Pour la famille Mothu, les maquettes de locomotives à l’échelle 1/14e – c’est-à-dire mesurant chacune environ deux mètres de long et pesant plus de cent kilos – conçues et fabriquées par Lucien Mothu étaient des objets de fierté familiale et de piété filiale5. L’attachement des filles de Lucien et de l’ensemble de la famille était d’autant plus fort que l’histoire de ces objets, il est vrai remarquables par leurs qualités techniques et leur processus de production, était indiscernable de l’histoire des Mothu eux-mêmes. À la mort de Lucien, le statut de relique s’est ajouté à celui de chef-d’œuvre et la sacralisation des maquettes a transpiré sur l’ensemble de l’atelier du créateur, dans le sous-sol du pavillon de la banlieue du Havre, devenu sanctuaire. C’était bien une sorte d’emprise qui s’exerçait sur les héritiers, dans un sens affectif mais aussi très concret matériellement, car la totalité de l’espace était occupée par les maquettes, l’établi, les outils et les rails adaptés aux locomotives – car Lucien Mothu avait construit un système démontable permettant de faire circuler ses machines dans la cour de la propriété. Les objets avaient une présence physique permanente, alors qu’ils avaient déjà rythmé la vie familiale durant des décennies du vivant du maquettiste qui avait passé des milliers d’heures à leur réalisation. Comment se détacher de cet encombrant héritage sans pour autant s’en débarrasser ? Les filles, le gendre et le petit-fils de Lucien Mothu ont cherché des solutions qui correspondent à l’idée qu’ils se faisaient d’un détachement respectant l’héritage : ils ont cherché à donner cet ensemble à un musée, avec comme conditions de ne pas achever les maquettes non terminées et de ne pas séparer locomotives et atelier. Il ne s’agissait pas seulement, pour eux, de donner des objets, mais de transmettre une existence entière matérialisée par une œuvre, ce dernier terme entendu à la fois comme production et comme processus créatif. Détacher les maquettes de l’atelier du maquettiste aurait été un manquement à la mémoire de Lucien, une façon de briser l’unité. Le don de l’ensemble à l’écomusée Creusot-Montceau fut la voie médiane la plus juste entre emprise et détachement. C’est là un exemple probant de la réciprocité des attachements individus/objets, montrant qu’on peut être à la fois attaché à quelque chose et attaché par cette chose : les Mothu tenaient à quelque chose qui les tenait.

Les attachements comme liens sensibles : prise et évaluation

5Ce cas n’est exceptionnel que par la dimension des objets en cause, car si le maquettiste avait davantage miniaturisé ses productions, la question de l’encombrement ne se serait pas posée aussi franchement, ou pas aussi rapidement. Car la matérialité concrète des objets conditionne l’attachement d’une façon déterminante, ce qu’une approche purement théorique de la notion risquerait d’escamoter. Sur ce point, la nuance terminologique proposée par Laurent Thévenot est d’une grande utilité, renvoyant au vocabulaire technique ou anatomique : selon lui, ce sont avant tout les attaches, au sens d’attaches musculaires par exemple, qui constituent des clés d’accès à la réalité de l’engagement familier des individus dans l’action. Il s’agit de qualifier des liens avant tout physiques, qui peuvent devenir des attachements au sens abstrait de rapport moral aux choses et former des « entrelacs d’attachements [qui] spécifient un engagement bien différent de l’appropriation privative d’un bien aliénable6 ». C’est par l’observation de l’engagement des acteurs, de leurs rapports indissociablement physiques et sociaux avec le monde et les choses, que Laurent Thévenot étudie toute la gamme de nuances entre les attaches, selon que l’individu s’attache à une chose ou soit attaché à une configuration. La dimension physique et sensible de ces liaisons intervient sur différents plans, dont celui de l’évaluation et de la qualification des objets. C’est ce qu’ont étudié très méticuleusement Christian Bessy et Francis Chateauraynaud dans leurs travaux sur l’expertise et l’authentification des objets vendus aux enchères. Ils tentent d’apporter à la sociologie de l’acteur-réseau et à celle de la justification une autre dimension, « celle de l’attention aux choses, et de tous les ressorts sensibles forgés par la pratique, nécessaires pour ancrer adéquatement les formes les plus ordinaires de vigilance et de participation au cours des choses7 ». Bessy et Chateauraynaud ont forgé et mis à l’épreuve le concept de prise, ancré dans les relations situées, susceptible de caractériser les données les plus fines sur lesquelles se fixe l’attention indispensable à la connaissance ou à la reconnaissance des objets, des plus communs aux plus rares. Ethnographier au plus près les relations individus/objets donne accès aux différentes formes d’attachements et à leur portée sociale, leur complexité signifiante. Cette approche fine des interactions a permis aux sociologues d’identifier deux phases dans l’opération d’estimation : « partir du corps de l’objet en s’efforçant de trouver les bonnes prises (de le priser) ; évaluer l’état du marché sur la base de la qualification générique de l’objet8 ». La première phase nécessite de construire son attachement à l’objet, y compris sensible et physique, la seconde implique de s’en détacher9. L’attachement devient ainsi un rapport d’emprise dont il faut nécessairement s’extraire pour l’expertise. Le détachement, indispensable à l’objectivation évaluatrice, consiste à dépouiller l’objet de sa charge affective singulière pour en mesurer les critères de valeur objective, reconnus par un réseau de professionnels. Cette configuration semble tout à fait similaire au processus de qualification des objets patrimoniaux qui nous intéressent ici.

Héritages et emprises mutuelles

6espaces savantslieuusineCar il s’agit bien, à propos d’objets matériels auxquels les individus et les groupes familiaux sont attachés selon différentes modalités, de se distancier d’une perception strictement affective pour poser une évaluation raisonnée, à l’échelle de la reconnaissance sociale des propriétés patrimoniales. Pour la famille Mothu, le détachement est passé par la transformation du legs paternel en collection muséale. Les maquettes de locomotive ont intégré l’héritage collectif, le Patrimoine – avec majuscule, au sens culturel du terme – en quittant l’héritage familial, avec une importante nuance entre les deux formes de transmission : le Patrimoine est un héritage choisi, intentionnellement sélectionné à partir de critères variés mais présumés objectifs ; l’héritage familial est parfois reçu passivement et n’est pas toujours désiré. L’exemple de la famille Chèze relève de cette réception d’un legs embarrassant. Philibert Chèze s’est implanté au lieu-dit le Montet (Palinges, Saône-et-Loire) au milieu du xix e siècle pour produire des poteries de grès et des produits céramiques réfractaires. L’usine a été en activité de 1860 à 1963. Elle a ensuite abrité une petite activité métallurgique jusqu’au début des années 1980, ce qui explique que l’ensemble des bâtiments n’a pas été démoli. La maison familiale n’est plus désormais occupée que durant les vacances des héritiers. Ces derniers, âgés d’une cinquantaine d’années, sont les quatre arrière-petits-enfants du fondateur de l’entreprise. Ils se sont retrouvés propriétaires d’une vieille et grande maison en pleine campagne, à plus de cent kilomètres de leur lieu de résidence – l’une des héritières vit même aux Etats-Unis – et d’une usine qu’ils n’ont jamais vu fonctionner.

7Ce qui a échu, « un peu par hasard » comme le dit l’une des héritières, aux actuels propriétaires du site, ce sont des bâtiments de différentes natures – usine, four monumental, dépendances, maison d’habitation patronale – ainsi qu’une foule d’objets disparate qu’il n’est pas possible de réduire à un stock de céramiques industrielles. Il y a dans les bâtiments d’usine, dans les caves et le jardin de la maison, le long des murs, des poteries invendues mais intactes, des fragments céramiques, des ratés de cuisson déformés, des ustensiles en grès utilisés par la famille. Il y a aussi des outils, des productions métallurgiques, un bric-à-brac sédimenté ici par les décennies d’activités diverses. Il y a également quelques objets particuliers, des créations céramiques du grand-père Gabriel Chèze, médecin aliéniste pratiquant le métier en amateur pendant ses loisirs. Il signait de ses initiales, dans les années 1910, des statuettes en grès émaillé que ses descendants découvrent peu à peu, disséminées dans les nombreuses pièces de la maison – les moules de ces statuettes ont été retrouvés dans l’usine.

8Le regard porté sur ces différentes catégories d’objets varie selon les personnes et selon les types d’attention aux choses. Ces objets peuvent être perçus comme de précieux documents sur l’histoire industrielle de la région, ou plus largement sur l’histoire de l’industrie céramique ; ils peuvent fournir des témoignages sur l’histoire du site, par exemple sur le passage de la production céramique à la métallurgie ; certains constituent de véritables et rares reliques familiales. Un objet ou un bâtiment peut tout à fait ressortir de plusieurs catégories, voire de toutes à la fois. Quant aux dimensions physiques des éléments de l’héritage, cela varie de quelques centimètres de hauteur pour les flacons et pots de grès, à trois étages pour un four à poteries d’environ quatre mètres de diamètre. Cette variation d’échelle intervient indéniablement dans l’emprise exercée par les choses sur les personnes, source de tension entre l’attachement à la mémoire familiale et l’encombrement de sa monumentalité. Empêtrés dans les vestiges industriels, les descendants des patrons du xix e siècle ne peuvent se résoudre à les détruire mais ne sauraient s’engager dans leur restauration. L’héritage est plus pesant quand il s’agit d’envisager la conservation d’un bâtiment qu’à propos de quelques poteries de grès posées sur une étagère.

9Mais qu’en est-il de la masse de la production : que faire des tonnes de céramiques laissées derrière elle par une production industrielle défunte ?

La question dimensionnelle au carrefour de deux temporalités

10L’entreprise Chèze faisait partie de la douzaine d’usines de production céramique, produisant des poteries principalement destinées au conditionnement alimentaire et chimique, simultanément en activité à l’apogée du secteur entre 1880 et 1900 dans la vallée de la Bourbince. Les poteries de grès cérame glaçuré sont intéressantes dans l’histoire de la production céramique et plus largement dans celle de la révolution industrielle sous l’angle de l’évolution de la consommation. Les spécificités techniques, fonctionnelles et commerciales de ces entreprises reflètent la spectaculaire mutation des modes de vie dans les premières décennies de l’urbanisation et de l’industrie de masse en France : conditionnement alimentaire individualisé (moutarde et bière par exemple), démocratisation de produits de luxe (liqueurs), apparition de produits nouveaux (chimie, yaourt).

11Dès leurs débuts, la production des manufactures de grès de la vallée de la Bourbince est faite de céramiques produites en série, aux dimensions strictement normalisées, vendues à des industriels ou à des détaillants avant d’être mises sur le marché, ce qui correspond à un infléchissement des critères de commercialisation marquant la charnière entre les deux siècles. Dans son Histoire de l’emballage en France, Denis Woronoff a montré comment la nécessité de « protéger et conditionner » les denrées était devenue un impératif de la société de consommation émergente au xviii e siècle, notamment du fait de l’intensification des échanges commerciaux au-delà des circuits locaux10. Le marché du flaconnage est révélateur à cet égard : par exemple la société des eaux de Vichy (Allier), située à une centaine de kilomètres de la vallée de la Bourbince, fut l’un des premiers clients des poteries de grès, dès les années 1810.

12matérialité des savoirsinstrumentinstrument d’inscriptionencreLe conditionnement des produits dans des récipients individuels correspond à une tendance lourde de la société de consommation, marquée par l’urbanisation progressive et par la plus grande mobilité des hommes, entraînant l’apparition d’objets portatifs11. Les cruches à bière12 et les bouteilles d’encre13 fabriquées en grès par les usines de la région en constituent des témoins majeurs : ces récipients se sont imposés au xix e siècle, massivement produits et largement commercialisés, parce qu’ils correspondaient à de nouveaux modes de vie – urbanisation, consommation à domicile, alphabétisation, expansion de l’écriture administrative. Nous touchons là un point crucial, celui des effets transhistoriques des conditions techniques et économiques du moment de la production, sur le temps patrimonial et sur la collection. Ces effets se combinent avec les processus de qualification du moment patrimonial contemporain, générés par les attaches et attachements des sujets aux objets, ils sont ancrés dans une historicité particulière qui a des répercussions sur l’attention portée aux objets. L’histoire des phénomènes sociaux s’inscrit dans la matérialité des objets, qui sont de véritables « points d’ancrage » de l’intrication temporelle des évolutions des pratiques et des représentations, pour reprendre les notions mises en évidence par Gianenrico Bernasconi. Revendiquant une « approche réaliste [qui] valorise la matérialité du document », il est parvenu à caractériser les « modalités d’inscription de la mobilité dans la matière », montrant « comment l’intensification de la mobilité pénètre les différents domaines de la vie quotidienne, transformant la relation à l’espace, les formes de l’interaction sociale ou encore la culture du souvenir »14. Cet accroissement de la mobilité, avec la diffusion plus large du goût pour le voyage, mais aussi l’intérêt de plus en plus marqué pour le confort domestique sont des phénomènes ancrés dans le xviii e siècle qui s’épanouissent massivement avec l’industrialisation au xix e siècle. Ainsi les bouillottes chaufferettes destinés à lutter individuellement contre le froid sont encore des objets de luxe au xviii e siècle 15 puis se démocratisent au siècle suivant : les manufactures de grès industriel, dont celles de la vallée de la Bourbince, produiront de grosses quantités de bouillottes jusqu’au milieu du xx e siècle. Les nouvelles pratiques et de nouveaux rapports sociaux se lisent dans les dimensions individuelles des objets, qui nous permettent de saisir des évolutions aussi bien sur le plan des techniques que sur celui de la consommation. Le développement des contenants individualisés entraîne la massification du nombre d’exemplaires produits et la diminution de la contenance. Les prises (Bessy et Chateauraynaud) et les attaches (Thévenot) activées aujourd’hui par les collectionneurs et les musées sont en partie déterminées par cette matérialité, puisqu’il est possible à la fois de singulariser des objets de collection de dimensions ordinaires, qu’un particulier peut conserver et exposer dans un espace réduit, et de constituer des séries calquées sur les séries industrielles16.

Massification de la production… et des patrimoines

13construction des savoirstraditionpatrimoine matérielL’ensemble de ces réflexions concerne le patrimoine dit industriel, dont la reconnaissance est en grande partie à l’origine du phénomène relativement récent d’« inflation tous azimuts du corpus patrimonial17 ». Cette légitimation ne s’est pas faite facilement et selon le spécialiste Pierre Fluck, reste largement une vue de l’esprit, car le patrimoine industriel cumule les handicaps : il ne fait pas rêver, rappelle la dureté de la condition ouvrière, la récession, le chômage et divers traumatismes, il est trop récent et dépourvu d’esthétique. « Le patrimoine n’est pas forcément désiré, et le patrimoine industriel en particulier a besoin de plaire pour se faire accepter18 ». Cet héritage non désiré encombre, notamment parce que ce qui est communément regroupé sous cette appellation sont des objets de grandes dimensions : usines, machines, cités ouvrières par exemple. Les produits des industries en font également partie, mais sont intégrés à d’autres catégories puisque le patrimoine architectural est distingué du patrimoine mobilier, notamment en France par l’Inventaire général du patrimoine culturel : ce service de l’État gère plusieurs bases de données, rassemblant les objets mobiliers (base Palissy et base Joconde pour les collections des musées de France) et les objets immobiliers (base Mérimée, œuvres architecturales)19. L’étanchéité entre les différentes classes patrimoniales ainsi qu’entre les différentes conceptions de l’objet lui-même a sa pertinence pour la systématisation de la connaissance qu’implique l’inventaire. Mais au ras du sol, dans le fouillis relationnel et affectif de l’enquête de terrain, les étiquettes patrimoniales classiques ne parviennent qu’approximativement à circonscrire la complexité des situations. Ainsi l’usine Chèze peut-elle être officiellement rattachée au patrimoine industriel20. Mais en tant qu’objet-usine, elle est constituée d’un ensemble de choses qui ne relèvent pas toutes de cette catégorie : elle comprend certes des bâtiments, des cheminées, des fours, de l’outillage, ainsi que des espaces végétalisés, des objets céramiques de différents statuts – stocks de produits, moules, briques, tuiles, accessoires réfractaires – et des objets marginaux par rapport à son activité principale qui font indéniablement partie de son histoire et portent une charge affective spécifique. L’ensemble forme également héritage familial, d’où un encombrement certain, un patrimoine « pas forcément désiré », entremêlé d’un réseau d’attachements de degrés variés.

14matérialité des savoirssupportsupport de communicationcollection artistiqueCe que j’essaie de mettre ici en évidence, ce sont les résonances entre les conditions de production des objets et le temps de leur patrimonialisation. Certes, la construction de la valeur patrimoniale est un processus en grande partie extérieur aux propriétés intrinsèques des objets, mais celles-ci, et notamment leurs propriétés physiques, ne sont pas totalement sans influence sur les jugements contemporains. Au carrefour des deux temporalités survient par exemple la question des déchets générés par l’industrie de masse. La mutation du secteur de production céramique a impliqué une réduction des dimensions des objets, puisqu’on est passé des grands contenants au conditionnement individuel, mais la massification de la production a aussi entraîné un accroissement des rebuts et des surplus. Localement, cela nous a donné l’opportunité de nous confronter à un terrain inédit, la fouille d’un dépotoir industriel21. Sans entrer dans le détail de cette expérience c’est bien une question de dimension qui a été soulevée par cette confrontation tangible à la masse matérielle. Ce sont bien ici des attaches physiques et cognitives existant entre sujets et objets qui s’avèrent pertinentes pour penser le rapport sensible à la masse d’objets fragmentés, obligeant à reconstituer mentalement leur intégrité initiale, nécessitant dans le cadre de la fouille un engagement physique de notre part. L’expérience a profondément modifié notre prise des objets, voire l’emprise exercée sur nous par cette mémoire industrielle. Nous pouvons y voir un écho du rapport des consommateurs du xix e siècle aux récipients céramiques, devenus objets courants puis abondants : leur vie quotidienne a été bouleversée par la production de masse et le conditionnement individuel. Le volume de production ayant été considérable, de nombreux objets restent encore en circulation sur le marché de seconde main ou dans des espaces de conservation publics et privés. Collectionner des céramiques industrielles n’équivaut pas à collectionner, par exemple, des objets d’art ou pour rester dans le domaine de la céramique, des faïences rares ou des porcelaines : ces dernières ne sont prisées que par une élite économique, sélective par les prix des objets. Leur « rareté résiduelle », pour reprendre la formule de Raymonde Moulin 22, est proportionnelle à la quantité initialement produite. Ce qui offre la possibilité aux collectionneurs d’objets industriels de constituer des séries et d’amasser de fortes quantités d’objets, impliquant un accroissement des collections et de l’espace occupé. Le reportage télévisé ou de presse écrite est un classique, qui montre un collectionneur cerné par une foule d’objets dont le nombre impressionnant et l’espace nécessaire à leur exposition génèrent des conséquences néfastes sur sa vie quotidienne et sur celle de sa famille. Les objets tiennent une place préoccupante dans l’existence des personnes et l’envahissement est d’autant plus problématique qu’il concerne des objets produits en masse. Sur le terrain, les collectionneurs de poteries admettent qu’ils sont encombrés par les objets et se questionnent sur la possibilité de transmettre leur collection. Quant aux musées, le problème d’espace disponible dans les réserves est récurrent. La problématique de l’encombrement patrimonial est similaire, mutatis mutandis, pour les collections privées et publiques. Outre la tension existant entre attachement et emprise, sélection d’objets et submersion matérielle23, l’historien Russell Belk a montré comment la collection telle que nous la connaissons aujourd’hui a émergé au cours des xviii e et xix e siècles par le jeu des interactions entre un certain « ethos » de la consommation, l’abondance d’argent disponible et de temps libre pour la bourgeoisie et l’aliénation industrielle des travailleurs transformant les hobbies hors de l’usine, dont la collection, en source de dignité24. La massification de la production matérielle peut donc se comprendre aussi à travers l’étude de la démocratisation de la collection et les deux temps de l’histoire des objets s’inscrivent dans une certaine continuité.

Entrelacs patrimoniaux, nœuds individuels et collectifs

15Les conceptions des attachements sur lesquelles nous avons bâti notre raisonnement impliquent une réciprocité entre l’individu s’attachant aux choses en se les appropriant et les choses exerçant une certaine emprise sur l’individu. La réciprocité des attachements est un point clé de l’étude de la collection, soulignent Bessy et Chateauraynaud : « Prise dans sa dynamique, la collection réclame une anthropologie qui renonce au partage classique entre sujet et objet, qui refuse une version intra et une version extra, qui surmonte la cassure entre les états d’âme singuliers et les lois d’airains du marché25 ». Selon ces auteurs, nous ne saurions distinguer entre une collection constituée autour de valeurs marchandes et une collection enracinée « dans le monde de l’enfance ou de la rêverie singulière26 ». Un constat analogue peut être établi pour le champ du patrimoine. L’écart entre attachement individuel et qualification collective ne constitue pas un ancrage pertinent pour notre problématique, y compris pour penser les propriétés dimensionnelles des objets : il n’y a pas de corrélation entre la taille des objets d’attachement et la caractérisation de cet attachement par une gradation de l’individuel au collectif.

16Comment la société pourrait-elle s’attacher à des objets ou à des monuments – à un « Patrimoine » – sans que les individus qui la composent n’éprouvent cet attachement, y compris pour des raisons singulières, voire intimes ? Dans une perspective durkheimienne, Maurice Halbwachs avait déjà remarqué que « si la mémoire collective tire sa force et sa durée de ce qu’elle a pour support un ensemble d’hommes, ce sont cependant des individus qui se souviennent, en tant que membres du groupe27 ». Il y a dans l’attachement des personnes aux choses des dimensions individuelles et des dimensions collectives entremêlées et interdépendantes, comme il en existe dans tous les domaines de la vie sociale : « on ne part plus d’une opposition entre la Société, agissant comme un être collectif monolithique, et l’Individu, atome irréductible doué d’une rationalité propre, enfermé dans la dialectique de l’égoïsme et de l’altruisme28 ». La construction des patrimoines non seulement ne fait pas exception, mais constitue de ce point de vue un terrain d’observation tout à fait passionnant. À propos des réactions à l’incendie du château de Lunéville en janvier 2003, Jean-Louis Tornatore a montré que l’émotion suscitée par le sinistre et l’engouement collectif en vue de la reconstruction du monument ont fait émerger « deux figures contrastées d’attachement – et par conséquent d’émotion patrimoniale29 ». Tandis que certains déploraient la perte d’un témoin historique, édifice marquant de la culture locale, d’autres avaient la sensation de perdre un lieu évocateur de souvenirs personnels. En effet, le château a connu diverses fonctions, muséales et administratives notamment, son parc est un lieu public fréquenté par les habitants qui entretiennent pour la plupart avec lui des relations familiales fortes. Établir une distinction tranchée entre valeur historique, liée à la mémoire collective, et valeur affective, plutôt individuelle et familiale, associées au monument n’aurait pas de sens : « L’objet d’émotion n’est pas seulement un monument de l’art et de l’histoire médiatisée par son appréhension lettrée, il est aussi un souvenir, au sens littéral de ce qui (re)vient à l’esprit d’une expérience passée, c’est-à-dire le château présent dans le souvenir des personnes qui l’ont rencontré et vécu à divers titres30 ». Les enquêtes de terrain sur les objets dotés d’une certaine valeur patrimoniale nous montrent que cette dernière est toujours polysémique, alimentée de références individuelles et collectives, familiales et régionales, personnelles et professionnelles, sans qu’il soit possible de clairement distinguer un registre d’un autre – et encore moins d’opposer un registre à un autre. Les deux exemples des familles Chèze et Mothu sont typiques des entrelacs patrimoniaux attachant les êtres aux choses dans la construction d’une mémoire aux multiples facettes. La circulation des objets et leur devenir ne peuvent se penser que dans le cadre de cette pluralité.

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18Comment un objet ou une chose devient-elle patrimoniale, au sens commun du terme ? Parce que des individus, formant collectif, y ont prêté attention et l’ont estimé intéressant au titre de la collectivité, combinant attachement individuel et déterminismes sociaux ancrés dans une certaine profondeur historique, également caractérisés par des dimensions matérielles et techniques. C’est peut-être là une nuance importante à apporter aux théories de l’attachement défendues par les tenants du pragmatisme et de l’étude des réseaux : proposer une étude pragmatique des attaches, des liaisons réciproques entre sujets et objets, des prises et de l’emprise permet de percevoir les effets de retour produits sur les personnes par les choses. Mais observer au plus près des situations les attachements ainsi caractérisés, non exclusivement affectifs, ne doit pas faire oublier qu’ils s’inscrivent dans un ensemble de cadres sociaux et historiques. La tension entre dimensions monumentales, pour des objets de grande taille ou des masses d’objets envahissantes, et attachement singulier – à une mémoire familiale ou individuelle – est intelligible par l’enquête ethnographique considérant au ras du sol les raisons de s’attacher à un objet ou à un monument, voire à un paysage, raisons à étudier dans leur historicité.

Notes
1.

Hodder, 2014.

2.

Callon, 1992, p. 60-62.

3.

Hennion, 2004 et 2010.

4.

Latour, 2000.

5.

Bonnot, 2006.

6.

Thévenot, 2006, p. 245.

7.

Bessy et Chateauraynaud, 2014 (1995), p. 478.

8.

Ibid., p. 116.

9.

Nous retrouvons ici, dans une perspective légèrement différente, l’oscillation attachement/détachement observée par Michel Callon.

10.

Woronoff, 2014.

11.

Bernasconi, 2015.

12.

Sigaut, 1997.

13.

Brongniart, 1877 (1844), p. 197.

14.

Bernasconi, 2015, p. 320.

15.

Dont Gianenrico Bernasconi donne une illustration page 261 de son ouvrage.

16.

Par exemple les séries de contenances des bouteilles d’encre, du 1/8e de litre au litre.

17.

Heinich, 2009, p. 21.

18.

Fluck, 2017, p. 54.

19.

Bases de données accessibles via POP, la plateforme ouverte du patrimoine : https://www.pop.culture.gouv.fr. Pour l’Inventaire général : http://www.inventaire.culture.gouv.fr/.

20.

Elle a sa notice sur la base Mérimée : https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/IA71002445.

21.

Bonnot, 2019.

22.

Moulin, 1978.

23.

Guillard et al., 2014 ; Vincent et al., 2011.

24.

Belk, 1995 et 2006.

25.

Bessy et Chateauraynaud, 2014 (1995), p. 141.

26.

Ibid., p. 168.

27.

Halbwachs, 1997 (1950), p. 94.

28.

Bessy et Chateauraynaud, 2014 (1995), p. 65.

29.

Tornatore, 2010, p. 113. La notion d’émotion patrimoniale renvoie à un projet collectif mené dans le cadre de la Mission à l’Ethnologie, Fabre et al., 2013. Sur le château de Lunéville, voir surtout Barbe et Tornatore, 2011.

30.

Tornatore, 2010, p. 113.

Appendix A Bibliographie

  1. Barbe et Tornatore, 2011 : Noël Barbe et Jean-Louis Tornatore (dir.), Les formats d’une cause patrimoniale. Agir pour le château de Lunéville, Les carnets du LAHIC n° 6, Lahic/Ministère de la Culture, direction générale des Patrimoines, département pilotage de la recherche et de la politique scientifique, https://www.iiac.cnrs.fr/IMG/pdf/carnet_6.pdf.
  2. Belk, 1995 : Russell Belk, Collecting in a consumer society, Londres, Routledge.
  3. Belk, 2006 : Russell Belk, « Collectors and collecting », dans Christopher Tilley et al. (dir.), Handbook of Material Culture, Los Angeles/Londres, Sage publications, p. 534-545.
  4. Bernasconi, 2015 : Gianenrico Bernasconi, Objets portatifs au Siècle des Lumières, Paris, Éditions du Comité des travaux historiques et scientifiques.
  5. Bessy et Chateauraynaud, 2014 (1995) : Christian Bessy et Francis Chateauraynaud, Experts et faussaires. Pour une sociologie de la perception, Paris, Petra.
  6. Bonnot, 2006 : Thierry Bonnot, « Les maquettes de Lucien Mothu », EspacesTemps.net, https://www.espacestemps.net/articles/les-maquettes-de-lucien-mothu/.
  7. Bonnot, 2019 : Thierry Bonnot, « Enquête pluridisciplinaire sur une mutation industrielle », Revue d’histoire du xix e  siècle, dossier « Histoire et archéologie : que faire du xix e siècle ? » sous la direction de Stéphanie Sauget et Manuel Charpy, 58, p. 41-58, https://journals.openedition.org/rh19/6432.
  8. Brongniart, 1877 (1844) : Alexandre Brongniart, Traité des arts céramiques ou des poteries considérées dans leur histoire, leur pratique et leur théorie, Paris, P. Asselin, vol. 2.
  9. Callon, 1992 : Michel Callon, « Sociologie des sciences et économie du changement technique : l’irrésistible montée des réseaux technico-économiques », dans Centre de Sociologie de l’Innovation, Ces réseaux que la raison ignore, Paris, L’Harmattan, coll. « Logiques sociales », p. 53-78.
  10. Fabre et al., 2013 : Daniel Fabre (dir.), Émotions patrimoniales, Paris, Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme.
  11. Fluck, 2017 : Pierre Fluck, Manuel d’archéologie industrielle. Archéologie et patrimoine, Paris, Hermann.
  12. Guillard et al., 2014 : Valérie Guillard (dir.), Boulimie d’objets. L’être et l’avoir dans nos sociétés, Louvain-la-Neuve, De Boeck.
  13. Halbwachs, 1997 (1950) : Maurice Halbwachs, La mémoire collective, Paris, Albin Michel.
  14. Heinich, 2009 : Nathalie Heinich, La fabrique du patrimoine, « De la cathédrale à la petite cuillère », Paris, Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme, coll. « Ethnologie de la France », vol. 31.
  15. Hennion, 2004 : Antoine Hennion, « Une sociologie des attachements. D’une sociologie de la culture à une pragmatique de l’amateur », Sociétés, 85, p. 9-24, https://www.cairn.info/revue-societes-2004-3-page-9.htm.
  16. Hennion, 2010 : Antoine Hennion, « Vous avez dit attachements ? », dans Madeleine Akrich, Yannick Barthe, Fabian Muniesa et al., Débordements : mélanges offerts à Michel Callon, Paris, Presses des Mines : http://books.openedition.org/pressesmines/744.
  17. Hodder, 2014 : Ian Hodder, « The Entanglements of Humans and Things: A Long-Term View », New Literary History, 45, p. 19-36.
  18. Latour, 2000 : Bruno Latour, « Factures/fractures. De la notion de réseau à celle d’attachement », dans André Micoud et Michel Peroni, Ce qui nous relie, La Tour d’Aigues, Éditions de l’Aube, p. 189-208.
  19. Moulin, 1978 : Raymonde Moulin, « La genèse de la rareté artistique », Ethnologie française, VIII, 2/3, p. 241-256.
  20. Sigaut, 1997 : François Sigaut, « La diversité des bières. Questions sur l’identification, l’histoire et la géographie récentes d’un produit », dans Dominique Garcia et Dimitri Meeks (dir.), Techniques et économie antiques et médiévales. Le temps de l’innovation, Paris, Errance, p. 82-87 : http://www.francois-sigaut.com/index.php/publications-diverses/publicatio ns/12-articles-fond/256-1997a.
  21. Thévenot, 2006 : Laurent Thévenot, L’action au pluriel, Paris, La Découverte.
  22. Tornatore, 2010 : Jean-Louis Tornatore, « L’esprit de patrimoine », Terrain, 55, p. 106-127, https://journals.openedition.org/terrain/14084.
  23. Vincent et al., 2011 : Odile Vincent (dir.), Collectionner ? Territoires, objets, destins, Paris, Créaphis.
  24. Woronoff, 2014 : Denis Woronoff, Histoire de l’emballage en France du xviii e  siècle à nos jours, Valenciennes, Presses universitaires de Valenciennes, coll. « Transports et mobilités ».