Philippe Chevallier

1Après des décennies d’attente et de supputations, Les Aveux de la chair, quatrième et dernier volume de l’Histoire de la sexualité, ont enfin été publiés en 2018. Avant cette date, les versions conservées n’étaient pas accessibles à la consultation, laissant courir toutes les hypothèses : Les Aveux de la chair allaient-ils profondément modifier notre perception de l’œuvre, renouveler les interprétations posées plus tôt par Foucault sur le christianisme, délivrer un dernier message – clé et chiffre en même temps?

2Il y a toujours de la déception quand le secret est enfin levé ; ce secret qui a longtemps tenu en haleine les chercheurs, comme si le livre indéfiniment attendu laissait l’œuvre entière à jamais ouverte, infinie. L’œuvre est maintenant close et, si un mystère demeure, il n’est sans doute pas dans ces Aveux à l’écriture lisse et transparente comme celle qui avait déjà étonné, en 1984, les lecteurs des deux précédents volumes,L’Usage des plaisirs et Le Souci de soi. Elle est plutôt dans le travail silencieux et souterrain qui l’a préparé, de 1977 2 à 1984, dont ne témoignent pas moins de sept boîtes d’archives – versions préparatoires et brouillons divers – conservées aujourd’hui à la Bibliothèque nationale de France, auxquelles s’ajoutent plusieurs boîtes de notes de lecture. Les Aveux de la chair est de toute évidence le livre auquel le philosophe consacra le plus de temps, et c’est même la première révélation de l’archive : de la parution de La Volonté de savoir à sa mort, Foucault n’a cessé de travailler sur le volet chrétien de l’Histoire de la sexualité. Si la préparation de la version finale – celle publiée en 2018 –, tient en trois boîtes, quatre sont dédiées aux rédactions plus anciennes des Aveux, soit 1 257 feuillets, souvent difficiles à dater, où différentes versions se croisent, se mélangent, malgré quelques numéros de chapitres ou de parties, et de précieuses tables des matières3.

3C’est ce travail silencieux et souterrain que nous voudrions ici retracer, en montrant comment le projet initial d’une histoire de la sexualité, annoncé par Foucault en 1975 dans le cours Les Anormaux, puis en 1976 dans La Volonté de savoir, n’a cessé de s’élargir à de nouvelles périodes et de s’enrichir de nouvelles thématiques au point de reléguer au second plan celle pourtant fondatrice de l’aveu – ce qui n’est pas sans conséquence sur l’interprétation de notre rapport historique à l’Antiquité chrétienne.

Préambule : identification de trois « moments » rédactionnels d’un même projet

4Au sein de cette archive qui ressemble à un flux continu, il nous a semblé possible de distinguer trois moments significatifs qui témoignent d’autant de manières d’aborder le problème initial de « l’histoire de l’aveu de la sexualité4 », tel que Foucault l’annonce en 1975 dans le cours Les Anormaux – les dates n’ayant ici de valeur qu’indicative :

  1. la confession moderne comme problème de gouvernement (1977-1979) ;
  2. la sexualité entre « rapport à soi » et « manifestation de soi » (1979-1981) ;
  3. la chair comme expérience (1981-1984).

5Cette reconstitution s’efforce de respecter trois principes. Tout d’abord, dessiner des ensembles cohérents, à la fois par leur lexique, leurs objets et leur méthode, mais aussi en regard des cours et conférences de ces années qui permettent d’établir une chronologie des problèmes formulés. Ensuite, soumettre toute datation alternative à ce même principe. Enfin, dans le cas où plusieurs datations se trouveraient en concurrence, privilégier la moins coûteuse : celle qui ne demande pas d’ajouter de nouvelles hypothèses ou de tordre par trop l’enchaînement des événements supposés.

6Avant de présenter ces trois moments, faisons deux remarques liminaires qui se complètent et corrigent la manière dont cette odyssée est habituellement présentée. Tout d’abord, si Foucault annonce, en 1976, La Chair et le Corps comme deuxième volume à paraître de l’Histoire de la sexualité – celui dédié au christianisme –, dès 1977 il remplace ce titre par Les Aveux de la chair, pour l’édition allemande de La Volonté de savoir 5. Cette modification précoce souligne l’unité d’un travail, au moins à partir de 1977, alors que les commentateurs ont encore tendance à user des deux titres pour distinguer deux « livres » éloignés dans le temps : La Chair et le Corps, qui aurait été rédigé dans la seconde moitié des années 1970 (et n’a pourtant jamais existé comme un texte autonome, comme nous allons le voir), et Les Aveux de la chair, corrigé en 1984 pour publication. La distinction n’a plus lieu d’être. Cette première remarque est confirmée par une seconde, issue de l’archive : la consultation des versions successives de ce que nous pouvons désormais appeler d’un même titre Les Aveux de la chair ne permet pas d’isoler une rupture nette ou une remise en question radicale du projet entre 1977 et 1984. Nous assistons plutôt à une série de glissements qui ne vont cesser d’élargir le projet initial. Par deux fois, comme nous allons le voir, le premier chapitre de l’ouvrage programmé enfle au point de devenir une partie à lui tout seul, qui devient à son tour un livre entier. Seule la comparaison des bornes – à laquelle nous condamnaient auparavant l’absence d’archive et les propos de Foucault – peut donner l’impression d’un saut qualitatif vers un tout autre projet, laissant dans l’ombre la continuité et la cohérence d’un travail que nous voudrions ici retracer.

1er moment : Les manuels des confesseurs ne sont pas à « mourir d’ennui » (1977-1979)

7La première version desAveux de la chair a longtemps été imaginée à l’ombre de ce que Foucault en a dit rétrospectivement en 1984 : « J’ai failli mourir d’ennui en les écrivant6 ». Le livre abandonné n’aurait été qu’une longue et monotone exploration des confessionnaux catholiques, du XVI e au XVIII e siècle, dans la droite ligne du cours Les Anormaux 7. Nous savons maintenant qu’il n’en est rien. Ce qui rend cette première version passionnante – pour les nombreux passages conservés –, c’est l’effort pour inscrire le dispositif de l’aveu des péchés dans le cadre plus général du « gouvernement des hommes », une rationalité politique singulière que définit en 1978 le cours Sécurité, Territoire, Population. Effort pour réunir, donc, deux cours pourtant très différents par leurs objets et leurs méthodes ; car si la confession est d’abord pour Foucault un discours, le gouvernement est une pratique. Expliquons-nous.

8Du premier projet des Aveux, trois versions manuscrites de l’introduction sont accessibles8. Elles approfondissent une importante question théorique qui induit des choix méthodologiques, déjà brièvement abordée dans Les Anormaux 9 : quelle est la réalité historique de la confession lue à travers les manuels des confesseurs ? Le peuple s’est-il si bien et si régulièrement confessé ? Certainement pas. Confessions bâclées, mal comprises, inégalement imposées : les manuels décrivent un idéal très éloigné de la réalité pastorale. S’il s’était agi d’analyser le gouvernement réel du peuple chrétien, d’autres sources historiques auraient été nécessaires : des archives de paroisses, des témoignages directs, des données quantitatives, etc10. Mais les manuels gardent toute leur importance en tant qu’invention dans l’ordre du discours qui n’aura de véritable efficacité que bien des siècles plus tard : dans sa reprise par la médecine ou la psychiatrie. Ce qui intéresse Foucault, ce n’est pas le vécu de la confession mais son existence comme énoncé : l’élaboration de « schémas d’intervention11 » qui sont d’abord une certaine manière de découper de nouveaux objets dans le discours et d’y définir de nouveaux modes d’énonciation.

9La première version des Aveux va cependant plus loin que cette analyse des événements discursifs héritée du cours de 1975. Les trois introductions conservées relient l’étude des techniques d’aveu à un projet plus large dont le vocabulaire est, sans ambiguïté, celui deSécurité, Territoire, Population : « gouvernement des individus », « conduite des hommes », « intensification du pouvoir pastoral »12, avec la même attention à cette période des XV e-XVII e siècles où la direction des âmes devient un problème religieux et politique central. Si le gouvernement est aussi un fait de discours – lequel passe par des traités, des conseils, des exemples –, il est d’abord un « art », une pratique toujours fragile, jamais garantie, à laquelle il faut s’exercer ; un art qui va donc bien au-delà d’un schéma dont la seule question était auparavant de savoir – dans le cas des manuels – s’il était appliqué ou non. S’il n’est pas un schéma qui s’applique, c’est parce qu’il reconnaît aux individus une autonomie que le pouvoir va prendre en charge dans la forme du « sujet » ; comme en témoigne cette période des XV e-XVII e siècles que Foucault qualifie, précisément, d’« Âge du sujet13 ». Mais qu’est-ce qu’un sujet dans cette première version des Aveux ?

10Revenons à l’acte de gouverner tel que le définit le cours de 1978 : gouverner, ce n’est pas imposer une loi, c’est agir sur autrui de telle manière qu’il agisse librement d’une certaine manière. Ce n’est pas renier sa liberté mais la solliciter afin qu’il s’oriente vers une certaine fin. Rien d’étonnant, dans ces conditions, à ce que le « rapport à soi » apparaisse dans l’une des trois introductions comme ce dont la direction des âmes a besoin, assurant la synthèse précaire entre une thèse (la domination d’autrui) et une antithèse (la liberté de l’individu)14. Le sujet du XVI e siècle, lu par Foucault, est donc loin d’avoir la plasticité que lui conféreront les analyses des années 1980, cette plasticité qui garantira toujours la possibilité d’un désengagement ou d’un retrait de soi. Les formulations de 1978 font au contraire toujours pencher les forces du côté d’autrui qui garde l’initiative : tout commence par un directeur qui précède et entoure le sujet, l’enveloppe de sa sollicitation attentive. Le sujet reste pris dans un « cycle de l’assujettissement15 » où la liberté, à peine découverte, se retrouve piégée en devenant à elle-même sa propre tâche : se réformer, s’ordonner à un principe. Être sujet, c’est toujours se lier à soi sous le regard de l’autre, par une pratique régulière ou une connaissance.

11Malgré ce « cycle de l’assujettissement », Foucault reconnaît des différences d’intensités entre les deux pôles du gouvernement (soi et autrui) tout au long de l’histoire chrétienne, comme en témoigne un passage important de cette première version : celui consacré au mouvement de la devotio moderna des XIV e-XV e siècles. Ce mouvement est remarquable car il vient, non pas de l’autorité ecclésiale, mais de groupes de fidèles qui revendiquent une vie réglée comme celle des moines pour s’émanciper de la tutelle des clercs. Foucault va jusqu’à parler d’une « volonté de règle » que porte, paradoxalement, un « esprit d’indépendance, de défiance souvent et parfois d’hostilité à l’égard du clergé »16. Préparant les réformes des XVI e-XVII e siècles, ces laïcs se réapproprient l’art spirituel né dans les monastères, celui de l’examen et de la méditation ; mais ils le font par et « pour eux-mêmes ». Bel exemple ici de « contre-conduites » qui ne sont pas – comme Foucault le souligne en 1978 – contre le pastorat, mais intérieures au pastorat17. L’Église s’empressera d’ailleurs, aux siècles suivants, de reprendre à son compte ces aspirations des laïcs pour en faire une pastorale générale du peuple chrétien.

12Cette analyse politique de la devotio moderna avait sa place dans le second chapitre – intitulé « Tous et chacun » – de la première partie des Aveux, tel qu’il apparaît dans le deuxième plan qui nous reste de cette version18. Cette première partie portait sur le gouvernement pastoral et précédait celle dédiée aux manuels de confesseurs. Elle est moins élaborée et moins rédigée que la seconde, ce qui permet d’y voir la couche rédactionnelle la plus récente de cette version abandonnée : Foucault a sans doute commencé à rédiger très tôt la partie sur les manuels des confesseurs, à la suite du cours de 1975 et de La Volonté de savoir, avant de décider de la faire précéder de réflexions plus larges sur le sujet et le gouvernement, à l’ombre des hypothèses nouvelles présentées en 1978 au Collège de France.

13Si le cœur de cette première version est bien le temps des réformes (1250-1550), s’y entend déjà l’appel du large, celui de l’histoire longue. La question du sujet et du gouvernement ouvre un champ nouveau de recherche, lequel va s’enfoncer dans les profondeurs de l’histoire chrétienne et ce, de deux manières. Tout d’abord, via la mention, dans ce chapitre « Tous et chacun », du monachisme ancien (saint Benoît) qui a tôt provoqué ce que Foucault appelle un « dimorphisme » de la vie chrétienne : divorce entre une direction forte, codifiée et de proximité – celle des moines –, et une direction plus lointaine, relâchée, incertaine dans son application – celle des laïcs19. Mais il faut aller plus loin. Dans le plan le plus abouti qui nous est parvenu de cette première version, celle-ci devait s’ouvrir sur un chapitre intitulé : « Le soin des âmes »20. Aucun chapitre dans les archives ne porte ce titre. Il est cependant fort probable, pour une question de cohérence chronologique, que ce premier chapitre devait aborder ce qui précéda le dimorphisme : la direction et le pastorat aux premiers siècles, en accord avec les leçons des 15 et 22 février 1978 – première véritable analyse des Pères de l’Église par Foucault 21.

14L’Antiquité chrétienne a donc déjà sa place dans le premier projet d’histoire de l’aveu. Mais le cours de 1978, tout comme un long texte inédit sur la chair chrétienne datant probablement de ce premier projet22, gardent la trace d’une manière hâtive, au moins très synthétique de lire les Pères : Foucault n’hésite pas à rapprocher des auteurs d’époques différentes, écrivant pour des audiences différentes. On passe ainsi, sans crier gare, de Tertullien à Augustin et d’Augustin à Cassien, tous lus au seul prisme de la direction et du gouvernement. Le cours Du gouvernement des vivants en 1980 témoigne au contraire d’une lecture plus approfondie, attentive aux déplacements opérés par chaque auteur en fonction de problèmes historiques distincts. Il annonce ainsi le deuxième moment du projet des Aveux.

2e moment : Les Pères de l’Église méritent bien un volume (1979-1981)

15Du gouvernement des vivants porte en 1980 une attention neuve à la part qui revient en propre au sujet dans les « actes de vérité ». Cette part volontaire, Foucault se propose de l’analyser désormais pour elle-même, indépendamment de son inscription dans une structure formelle de gouvernement. En ouverture de la leçon du 13 février 1980 consacrée à Tertullien, se trouvent ainsi des expressions qui annoncent le virage du « dernier Foucault » : « exercice de soi par soi », « transformation de soi par soi », « spiritualité »23. Le terrain historique facilite cette mise à l’écart de la question du pouvoir : Foucault s’intéresse désormais à une période où l’Église chrétienne n’a pas encore fait de la direction de tous l’objet d’une technique particulière. Longtemps il a cru le contraire : à plusieurs reprises, avant 1980, Foucault assimile le premier christianisme à une période de mise en œuvre d’une pastorale généralisée où états de vie et pratiques auraient été immédiatement reliés à des techniques de direction24. Il reconnait cette erreur dans le cours de 1980  : aux premiers siècles, le thème pastoral « ne coïncide pas avec l’idée ou avec la technique d’une direction. »25 Absence de direction continue et individualisante ne veut pas dire pour autant absence d’obligations de vérité : la discipline du baptême comme celle de la pénitence requièrent du croyant qu’il pose un certain nombre d’actes manifestant la vérité de sa préparation. Les actes d’aveu restent ainsi l’horizon de la recherche ; mais ils sont inclus désormais dans la question plus large du rapport entre subjectivité et vérité, lequel peut recouvrir des types d’interactions, des formes de manifestation et des modalités d’intervention d’autrui très variés.

16Cette grande variété d’actes du sujet dont témoigne l’Antiquité chrétienne empêche de ne voir en elle que la simple préparation de notre modernité. Cette prise de conscience convainc Foucault qu’elle mérite bien un volume à part entière et non plus seulement un chapitre. Un projet de préface, qui sera ultérieurement publié dans The Foucault Reader, atteste ainsi d’un nouveau plan de l’Histoire de la sexualité dans lequel le deuxième volume est désormais entièrement consacré aux premiers siècles chrétiens. Foucault y justifie, déjà, un « déplacement chronologique considérable » qui l’a amené à faire porter « l’essentiel du travail sur ce qui ne devait en être que le point de départ ou l’arrière-plan historique » : l’Antiquité tardive26. Malgré cette halte antique prolongée, Les Aveux de la chair se conçoivent encore comme prolégomènes à une analyse de l’époque médiévale puis moderne. Après un exposé des procédures de « manifestation de soi » aux premiers siècles, proche du cours de 1980, un fragment de cette deuxième version souligne « que l’organisation de la pénitence, au Moyen-Âge, sur un modèle juridico-sacramentaire, constituera une sorte d’unification de ces différentes procédures27 ». Et Foucault de préciser que l’« expérience nouvelle » de la chair aux premiers siècles ouvre sur la longue histoire du « savoir du sexe »28. La perspective de l’aveu et de la sexualité est donc inchangée.

17Ce nouveau volume donna lieu à la rédaction, probablement autour de 1980-1981, de passages moins nombreux que pour la première version, mais suffisamment aboutis pour qu’une préface et un chapitre introductif aient été dactylographiées et corrigés29, tandis que certaines pages étaient rédigées avec des notes de bas de page. Comme pour la première version des Aveux, cette nouvelle version connut deux plans successifs30 : le premier, d’un seul tenant, fit place à un découpage en deux parties qui mérite attention. Commençons par la dernière de ces deux parties, car elle nous est immédiatement familière : intitulée « La manifestation de la vérité », elle trace sans surprise une voie royale vers l’aveu du deuxième millénaire (du concile de Latran IV à celui de Trente) à partir des analyses du cours Du gouvernement des vivants sur la probatio, l’exomologèse et l’exagoreusis. La première partie est en revanche moins charpentée, encore incertaine dans ses contours, et contient surtout l’élément perturbateur qui va amener un nouvel élargissement du projet. Intitulée « La mesure des plaisirs », cette partie aborde déjà la question de la morale stoïcienne et, en particulier, du mariage dans l’Antiquité gréco-romaine. Le ver est dans le fruit : n’y a-t-il pas là matière à une nouvelle exploration, l’invitation à une nouvelle curiosité ?

18Cette deuxième version des Aveux se reconnaît à son porche d’entrée : la morale de l’éléphant – animal loué depuis l’Antiquité gréco-romaine jusqu’à saint François de Sales pour sa sexualité monogame, fidèle et pudique31. Cette mention est à rapprocher de cours et conférences des mêmes années : l’éléphant fait son apparition publique lors du séminaire à l’Université de New York en novembre 1980 et sera reprise le 7 janvier 1981 en ouverture du cours Subjectivité et vérité. L’animal à trompe annonce un changement de décor : en ses différentes versions païennes puis chrétiennes, la conjugalité du mammifère place désormais Les Aveux de la chair sous l’énigme première, et non plus subsidiaire, du rapport entre les deux Antiquités. Que devons-nous aux grecs, que devons-nous aux chrétiens ? Comment opérer ce difficile « partage des eaux32 » que cite Foucault en référence à The Making of Late Antiquity de Peter Brown ? Certes, l’Antiquité gréco-romaine apparaissait dans les cours de 1978 et 1980, mais son rôle se limitait à comparer les techniques de direction et d’examen de conscience. La référence à la morale de l’éléphant ouvre désormais sur la question plus large du mariage et de ce qu’il engage : rapport au plaisir sexuel, à la semence, à la procréation. Ce faisant, elle provoque un nouveau glissement du livre en préparation : dans ce champ nouveau des règles de la vie conjugale, les techniques de direction et, plus largement, les actes de vérité deviennent, sinon secondaires, au moins insuffisants pour établir une partition entre les deux Antiquités. Limités à certains moments et rituels de la vie du chrétien, ils n’affectent pas la vie quotidienne. Il convient donc d’étendre les éléments de comparaison aux dimensions de ce que Foucault va alors nommer une « expérience »33. Ce terme, si important dans le cours Subjectivité et vérité en 1981 et l’introduction à L’Usage des plaisirs en 1984, se trouve au cœur de cette deuxième version où il désigne à la fois un « domaine subjectif qu’on éprouve en première personne » et un « champ d’objet à connaître et à analyser »34. Son usage a deux conséquences remarquables sur le projet en cours : tout d’abord, il réorganise les éléments constitutifs de la chair chrétienne autour du seul « rapport que l’individu entretient à lui-même35 » ; ensuite, il appelle des analyses historiques plus riches qui précèdent désormais, dans le plan du livre, la question étroite de la manifestation de la vérité de soi – manifestation qui n’est qu’une modalité de l’expérience parmi d’autres, y compris dans le christianisme.

19Mais voilà : en se demandant ce que le christianisme a apporté à l’expérience morale antique, Foucault croit au départ expédier les fausses réponses en un simple chapitre : celui sur « La morale de l’éléphant », précisément. Soulignant la continuité des préceptes conjugaux, il montre que ce n’est pas sur ce plan que se joue la différence chrétienne. Mais pour démontrer la continuité des préceptes, il faut d’abord ressaisir la cohérence de la morale païenne, en particulier stoïcienne, que rencontra le christianisme à ses débuts. C’est à une telle synthèse du « fond commun de la morale » des premiers siècles que s’emploie un texte qui suit celui sur l’éléphant et dont l’archive offre deux versions36. Ces deux versions portent le même titre : « Nouvelle éthique », expression utilisée lors du séminaire au New York University Institute for Humanities en novembre 1980 37. Dans la première version du texte, Foucault égrène, assez schématiquement, cinq domaines où il y eut consensus prescriptif dans l’Empire : 1/ la valorisation du mariage, 2/ la condamnation de l’adultère, 3/ la disqualification de l’acte sexuel, 4/ la finalité procréatrice, 5/ l’éthique conjugale. Mais dans la seconde version de ce texte, l’énumération ne dépasse pas le premier point car Foucault se lance dans un long exposé de près de trente pages, là où la première version se contentait de quelques paragraphes. Comme pour les Pères de l’Église, Foucault prend conscience qu’il ne peut synthétiser en quelques lignes ce qui serait le point d’aboutissement de la morale païenne, en faisant l’impasse sur son histoire complexe et les différents courants philosophiques qui l’ont précédé. Commence ici un nouveau mouvement d’approfondissement, où le souci de la rigueur se mêle à cette curiosité devenue une éthique de la recherche.

3e moment : Finir là où l’on avait cru commencer (1981-1984)

20La comparaison entre les morales antiques requiert désormais de consacrer un volume à l’Antiquité gréco-romaine, lequel est déjà planifié en mai 1982 38, puis finalement deux. Cette comparaison impose surtout de commencer la lecture des Pères, non plus par les manifestations de la vérité de soi, mais par la gestion des plaisirs naturels (les aphrodisia chez Clément d’Alexandrie), comme c’est le cas dans la dernière version des Aveux sur laquelle travaillait Foucault en 1984 – dernière version qui, à nouveau, bouleverse le projet initial.

21À l’automne 1982, Gallimard reçoit de Foucault le manuscrit final des Aveux de la chair, dont la rédaction a dû commencer de toute évidence après le séminaire à New York de novembre 1980 – puisque les développements sur la virginité et le mariage, s’ils reposent sur les mêmes auteurs (Clément d’Alexandrie, Méthode d’Olympe, Basile d’Ancyre, Augustin), témoignent de lectures renouvelées par rapport à l’intervention américaine39. Devenu le quatrième volume de l’Histoire de la sexualité, les Aveux sont assurément le dernier : même si Foucault y fait mention d’une « étude suivante40 », l’introduction en 1984 à L’Usage des plaisirs, tout comme son « Prière d’insérer », n’annoncent pas de cinquième volume. Cela signifie que Les Aveux se libèrent étrangement – et peut-être enfin – de l’obligation de rendre compte du discours moderne sur la sexualité dans la forme de l’aveu41. Ce qui a une conséquence remarquable sur la version finale : parce qu’elle ne pointe plus vers la généralisation de la confession, Foucault supprime dans cette dernière version ce qui était pourtant l’horizon sans cesse annoncé de ses analyses des premiers siècles chrétiens, au moins depuis 1978 : la résolution au deuxième millénaire du « dimorphisme » de la vie chrétienne, celui qui avait séparé le moine du laïc, le procès-verbal privé (exagoreusis) de l’ancien théâtre public des péchés (exomologèse). Réconciliation que devait accomplir la confession moderne à l’issue d’une longue histoire qui n’aurait eu d’autre destin que de croiser toujours plus fréquemment et étroitement ces deux figures. L’horizon de leur réunion était même la seule raison de l’étude de leur différence originelle et annonçait le retour prochain, dans les volumes à venir de l’Histoire de la sexualité, des thèmes du gouvernement et de l’Église, de la pastorale et de la politique. Nous l’avons vu : la nécessaire résolution de ce dimorphisme apparait très tôt dans la première version des Aveux, où Foucault en fait le moteur de l’âge pastoral des réformes, tandis que le cours de 1980 fait encore signe vers elle42.

22Mais rien ne se passa comme prévu. Dans la dernière version des Aveux, là on l’on aurait été en droit d’entendre à nouveau cette annonce, dans ce passage où est exposée pour la nième fois la spécificité des techniques de soi développées dans le monachisme, et alors même qu’est mentionné derechef le « dimorphisme » du christianisme, Foucault se contente de souligner sobrement la rupture introduite par la vie monastique43. À la place de l’annonce attendue, celle qui devait orienter le lecteur vers le sujet même de l’histoire de la sexualité (l’aveu pour tous institutionnalisé dans et par l’Église), on trouve une dernière partie sur Augustin et le mariage. Foucault a-t-il volontairement retiré ici un chapitre ou une partie ? Ce n’est pas impossible car « Être marié » désignait d’abord la quatrième et non la troisième partie des Aveux 44.

23À la place de deux séries de techniques appelées à se rencontrer au deuxième millénaire, Foucault dessine en fait, à la toute fin des Aveux, les contours d’un socle commun d’expérience, non plus entre le moine et le laïc, mais entre le moine et les époux dans une même analyse de la concupiscence45. La résolution n’est plus à venir car elle est déjà accomplie par Augustin et le combat spirituel qui réunissent les exigences de la virginité et celles du mariage. Le paysage et la portée des assertions changent brusquement : Ve siècle et non plus XVIe siècle ; annonce allusive des liens noués par notre culture entre « le sexe, la vérité et le droit46 » et non plus identification historiquement précise d’une mutation de la pastorale. Les Aveux se referment sur l’expérience d’un désir qui intériorise l’histoire de la sexualité dans l’analyse de soi. Au profit d’une histoire plus large et plus ambitieuse que celle des procédures de vérité ? Sans doute, même si elle demeure, dans les dernières pages de l’édition de 2018, à l’état de signe indiciel. Cette lueur moderne à la toute fin du livre s’apparente à une disparition qui rend encore plus parfaits et accomplis ce que sont les derniers volumes de l’Histoire de la sexualité devenus : une histoire de l’expérience morale antique qui semble désormais se suffire à elle-même. Ce choix permet d’écarter le risque de lecture téléologique de l’Antiquité dont les premières versions des Aveux ne se libéraient pas complètement, ne serait-ce que par le geste de remonter toujours plus haut, d’aborder toute ère nouvelle en venant de son futur.

24Ne pas demander trop vite à l’Antiquité chrétienne des comptes sur notre modernité, c’est desserrer les liens de causalité et déplier la richesse d’une culture où il est question de techniques de soi, mais aussi d’art et de règles de vie, de problèmes et d’idées, de doctrines et de sens spirituel des conduites. Si les premiers siècles chrétiens importent à nos yeux de modernes, ce n’est pas seulement pour des raisons généalogiques, mais aussi parce qu’ils offrent d’étonnants modèles de vie morale, à la fois libres et positifs – ceux-là mêmes que nous sommes aujourd’hui en peine d’inventer pour nous-mêmes.

Tables des matières conservées des
Figure 1. Tables des matières conservées des Aveux de la chair
Notes
1.

Nous remercions chaleureusement Philippe Büttgen, Henri-Paul Fruchaud, Colin Gordon, Niki Kasumi Clements, Philipp Rosemann et Arianna Sforzini pour leur relecture et leurs commentaires. Les recherches de Michel Senellart et de Daniele Lorenzini furent également une grande inspiration. Une version plus longue de ce texte parait simultanément en anglais dans The Maynooth Philosophical Papers : « The Birth of Confessions of the Flesh. A Journey through the Archives » (trad. Charles A. Piecyk).

2.

L’année 1977 semble un bon point de départ : la chronologie de Daniel Defert indique que Foucault « écrit sur les Pères de l’Église » en août 1977 : Foucault, 2015 : XXVI. La première mention substantielle, dans l’œuvre publiée, d’une lecture des Pères se trouve dans l’entretien qui s’est tenu « peu de temps après la parution de La Volonté de savoir [le 17 novembre 1976] » et publié en juillet 1977 : « Le jeu de Michel Foucault » (Foucault, 2001 : n° 206, 313).

3.

Nous les reproduisons en annexe.

4.

Foucault, 1999 : 158.

5.

Laquelle annonce en deuxième volume : Die Geständnisse des Fleisches. Conformément à un plan alternatif manuscrit de l’Histoire de la sexualité qui se trouve dans la boîte 51, dossier 3, Archives Foucault, BnF, NAF 28730 (nous citons désormais les archives conservées à la BnF par dossier, et de la manière suivante : « boîte-dossier » ; soit, ici : dossier 51-3).

6.

Foucault, 2001 : n° 357, 1549.

7.

Foucault, 1999 : 155 et suiv.

8.

Dossiers 86-1 ; 87-8 ; 87-10.

9.

Foucault, 1999 : 177.

10.

Dossier 87-10.

11.

Dossier 87-10. Foucault s’intéresse ici d’abord à ce qui est un « fait de discours », comme dans Les Anormaux.

12.

Respectivement : dossiers 87-10 ; 87-8 ; 86-1. La pastorale apparaissait déjà dans La Volonté de savoir mais se limitait à la prolifération des discours dans et par la confession.

13.

Dossier 89-1.

14.

Dossier 87-8.

15.

Dossier 87-5. S’établit toujours un lien de « domination » ou de « vérité » : dossier 87-2.

16.

Dossier 89-1.

17.

Foucault, 2004 : 198 ; 218.

18.

Voir l’annexe, plan 1.b.

19.

Dossier 89-1.

20.

Voir le plan 1.b en annexe.

21.

Foucault, 2004 : 151 et suiv. Un indice renforce cette hypothèse : quand « Le soin des âmes » était l’unique chapitre précédant l’analyse des manuels des confesseurs, c’est-à-dire avant la division du plan initial en deux parties, Foucault en avait détaillé le contenu comme suit : « 1. Direction de conscience dans l’Antiquité ; 2. Le Pastorat ; 3. Le Dimorphisme ; 4. La généralisation de l’art spirituel » (dossier 86-1). Les deux derniers points ayant été pris en charge par « Tous et chacun », restaient donc les deux premiers à traiter.

22.

Dossier 87-3. Ce texte propose une lecture des Pères plus riche, par les auteurs et les thèmes convoqués, que celle du cours de 1978 (on y trouve un exposé sur la virginité et la mention de La Cité de Dieu d’Augustin) ; mais il conserve comme grille de lecture le gouvernement pastoral, entendu comme direction et obéissance, ce qui le situe sans hésitation avant la leçon du 19 mars 1980 qui signe l’adieu à ce modèle pour interpréter les premiers siècles chrétiens.

23.

Foucault, 2012 : 111.

24.

Voir Foucault, 2004 : 151 ; Foucault, 2015 : 1343 (Foucault, 2001 : n° 291, 967). Voir aussi le chapitre « Tous et chacun » des premiers Aveux (dossier 89-1) et le texte inédit déjà mentionné (voir note 22) sur l’expérience de la chair aux premiers siècles, qui inscrit la virginité au centre du trièdre de l’obéissance, de l’aveu et de la direction – raccourci que s’interdira la dernière version des Aveux.

25.

Foucault, 2012 : 249.

26.

Dossier 64-3, pour le dactylogramme ; Foucault, 2001 : n° 340, 1403, pour la version publiée en 1984.

27.

Dossier 87-4.

28.

Dossier 87-4.

29.

Respectivement, dans le dossier 64-3 (texte publié dans Foucault, 2001 : n° 340) et dans le dossier 64-4.

30.

Cf. les plans 2.a & 2.b en annexe.

31.

Il en existe une version dactylographiée (dossier 64-4) et deux versions manuscrites (dossiers 87-11 ; 87-15). La morale de l’éléphant apparait furtivement dans le texte déjà cité sur la chair chrétienne (cf. note 22). L’éléphant reviendra dans L’Usage des plaisirs, mais il n’y joue plus le rôle de blason (Foucault, 1997 (1984) : 25-27).

32.

Dossier 87-15 ; cf. aussi Foucault 2001 : n° 312, 1127. La question occupe à l’époque beaucoup de ses lectures : voir les dossiers 79-5 ; 79-6, où l’on trouve des notes sur W. R. Halliday, M. Spanneut, H. Chadwick, A. Bonhöffer, etc.

33.

La première mention du terme semble être cependant le texte inédit sur la chair chrétienne déjà cité (voir note 22). Texte charnière entre les deux premiers « moments » rédactionnels, il enrichit les analyses de l’aveu et du pastorat par la notion de « chair », entendue désormais comme une « modalité d’expérience ».

34.

Dossier 87-15.

35.

Dossier 64-4. Sur le lien entre expérience et rapport à soi, voir aussi Foucault, 2014 : 102.

36.

Dossiers 90-1 et 90-2. En mentionnant ce « fond commun », assimilé à un « assez vaste consensus », Foucault minimise les « quelques différences qui touchent surtout à l’insistance sur certains thèmes privilégiés » (dossier 90-1).

37.

Dossier 40-6. Nous remercions Henri-Paul Fruchaud de nous avoir transmis sa transcription.

38.

En mai 1982, Foucault publie un texte sur Cassien, sous le titre « Le combat de la chasteté », en le présentant comme une partie du « troisième volume de l’Histoire de la sexualité » (Foucault, 2001 : n° 312, 1114).

39.

On notera des analyses sensiblement différentes, par leur amplitude et leurs conclusions, du Pédagogue II, 10 de Clément d’Alexandrie (réduites à quelques lignes en 1980) et du De habitu virginum de Cyprien. Le développement sur Basile d’Ancyre est en revanche similaire, quoique plus bref également en 1980.

40.

Foucault, 2018 : 254.

41.

On trouve une très brève mention de la pénitence médiévale, mais celle-ci vise surtout à insister sur ce que n’est pas la pénitence des premiers siècles : une verbalisation détaillée des péchés (Foucault, 2018 : 104-105).

42.

Foucault, 2012 : 306 ; 206. Voir aussi un fragment du deuxième « moment » rédactionnel : dossier 87-4.

43.

Foucault, 2018 : 243. Le dimorphisme et sa résolution aux XVIe-XVIIe siècles se trouvent dans des feuillets qui sont supposés avoir été rangés par Foucault avec le dernier manuscrit, et que l’éditeur a choisi de publier en annexe (Foucault, 2018 : 369-370). Le classement, souvent circonstanciel, est rarement un indice probant dans le cas des archives Foucault, et ce choix éditorial ne doit pas masquer que rien dans les annexes ne les relie au vocabulaire et aux problèmes historiques de la dernière version des Aveux : l’annexe 2, qui mentionne le dimorphisme, reprend en fait des matériaux de 1978 et de 1980 (on notera l’usage du terme « alèthurgie ») et réunit le moine et le laïc dans un même « champ institutionnel » (l’Église et le pouvoir pastoral) – hypothèse abandonnée dès 1980.

44.

Dossier 85-5 : Foucault barre « Quatrième » et marque « 3 ».

45.

Foucault, 2018 : 360. Reprise d’une intuition esquissée dans la conférence à Tokyo de 1978 « Sexualité et pouvoir » (Foucault, 2001 : n° 233, 565-566).

46.

Foucault, 2018 : 361.

Appendix A Bibliographie

Foucault, 1997 (1984) : Michel Foucault, Histoire de la sexualité, t. 2 : L’Usage des plaisirs, Paris, Gallimard, « Tel ».
Foucault, 1999 : Michel Foucault, Les Anormaux, Cours au Collège de France, 1974-1975, Valerio Marchetti et Antonella Salomoni (éd.), Gallimard, Le Seuil, « Hautes études ».
Foucault, 2001 : Michel Foucault, Dits et Écrits, t. 2, Daniel Defert et François Ewald (éd.), Paris, Gallimard, « Quarto ».
Foucault, 2004 : Michel Foucault, Sécurité, Territoire, Population, Cours au Collège de France, 1977-1978, Michel Senellart (éd.), Paris, Gallimard, Le Seuil, « Hautes études ».
Foucault, 2012 : Michel Foucault, Du gouvernement des vivant, Cours au Collège de France, 1979-1980, Michel Senellart (éd.), Paris, Gallimard, Le Seuil, « Hautes études ».
Foucault, 2014 : Michel Foucault, Subjectivité et vérité, Cours au Collège de France, 1980-1981, Frédéric Gros (éd.), Paris, Gallimard, Seuil, « Hautes études ».
Foucault, 2015 : Michel Foucault, Œuvres, t. 2, Paris, Gallimard, « bibliothèque de la Pléiade ».
Foucault, 2018 : Michel Foucault, Histoire de la sexualité, t. 4 : Les Aveux de la chair, Frédéric Gros (éd.), Paris, Gallimard.